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Validation des acquis de l’expérience professionnelle (VAEP) en Haïti, un défi à relever

Ils sont nombreux ceux qui exercent des métiers de routine tant à Port-au-Prince que dans les villes de province. Fort souvent, ces gens n’ont pas eu la possibilité de fréquenter une école de formation professionnelle au préalable, ils apprennent leurs métiers dans une entreprise, dans un atelier, communément appelé chez nous «Shop», sur le tas par l’intermédiaire d’un autre professionnel qui lui aussi, dans la majeure partie des cas, apprenait son métier dans les mêmes conditions.

En effet, personne ne peut mettre de côté les compétences de certains techniciens du secteur informel. La preuve, quand vous trouvez quelqu’un qui a la capacité de résoudre un problème donné, vous éprouvez du coup de la joie, mais quand il s’agit de quelqu’un qui n’a pas de compétence suffisante, c’est tout à fait le contraire.

Fort de ce constat, et en tant qu’éclaireur de la conscience collective, nous sommes très enthousiasmé de voir que, le 25 février 2019, l’État dote le pays d’une loi portant Reconnaissance et validation des acquis de l’expérience professionnelle (RVAEP). Toutefois, pour mieux situer notre travail, faisons mention de quelques articles clés de cette loi !

Article 1.-La présente loi organise et détermine les conditions requises pour la reconnaissance et la validation des acquis de l’expérience professionnelle (RVAEP)

Article 2.- Chaque salarié a le droit de faire connaître et valider les acquis de son expérience professionnelle, dans les conditions prévues par la présente loi et les règlements, et de jouir les privilèges qui y sont attachés.

Peuvent faire une demande de reconnaissance et validation des acquis de l’expérience professionnelle, les activités professionnelles exercées par un salarié de façon continue ou non, pendant une durée totale cumulée de six ans au moins et en rapport avec la certification professionnelle visée. Ces activités professionnelles salariées doivent être réalisées dans les entreprises qui sont en règle avec la législation fiscale et qui respectent la législation sur la sécurité sociale.

Article 5.- La validation des acquis de l’expérience professionnelle se déroule selon les étapes successives:

information et conseil;

recevabilité;

accompagnement;

Certification.

L’information et le conseil ont pour objet d’informer le professionnel intéressé des conditions et étapes de la validation des acquis de l’expérience professionnelle (VAEP) de situer son expérience professionnelle et sa culture générale par rapport à une certification professionnelle et de constituer le dossier de candidature.

La recevabilité consiste à instruire les dossiers de candidature et à décider de la recevabilité de la candidature.

L’accompagnement permet d’aider le salarié dans la rédaction de son dossier de description de l’expérience professionnelle, d’apprécier son niveau de culture générale au regard de la certification postulée et de le préparer à l’étape de certification.

La certification permet au jury de statuer sur la validation des acquis de l’expérience professionnelle du candidat sur la base d’un référentiel d’emploi et d’un référentiel de certification.

Article 6.- Les institutions de formation professionnelle habilitées à une validation des acquis de l’expérience professionnelle doivent être agréées par l’État.

La demande de validation des acquis de l’expérience professionnelle est adressée au chef de l’établissement agréé en même temps que la demande d’inscription auprès de l’établissement en vue de l’obtention du certificat à finalité professionnelle.

Article 7.- Un candidat ne peut déposer, au cours de la même année civile pour un même certificat ou diplôme, qu’une seule demande et ne peut saisir qu’un seul établissement agréé.

La demande précise le certificat ou le diplôme postulé. S’il postule des certificats différents, il ne peut au total déposer plus de trois demandes de validation au cours de la même année civile. Ces obligations et l’engagement sur l’honneur du candidat à les respecter doivent figurer dans chaque formulaire de candidature à une VAEP.

Au terme de l’article 12, les diplômes nationaux de l’enseignement de licence, de master, de doctorat ne sont pas accessibles par la voie de validation des acquis de l’expérience professionnelle (VAEP).

Les diplômes intermédiaires à finalité professionnelle de l’enseignement supérieur sont accessibles par la voie de validation des acquis de l’expérience professionnelle (VAEP).

Et enfin, considérant l’article 16, à la fin de chaque année académique, les établissements agréés à délivrer les certificats de validation des acquis de l’expérience professionnelle (VAEP) dressent un rapport complet au Ministère de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle des demandes de la VAEP qu’ils ont traitées.

Ce que l’on devrait retenir, c’est que la société haïtienne fonctionne à environ 70% dans l’informel. Notant qu’ils sont légion les professionnels des rues. Selon une enquête menée par l’association En route vers la technique (ETECH), en novembre 2010, les experts ont fait choix de deux échantillons de techniciens dans trois zones de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince, et ce pour un total de deux filières. Le premier échantillon regroupe les réparateurs d’automobile de la rue du Champ-de-Mars et ceux du corridor Bois-de-Chêne communément appelé Nan Palmis, et l’autre concerne ceux qui exercent le métier de menuisier à l’avenue John Brown à proximité de Poste-Marchand. En termes de résultats, 50% ne sont que des apprentis, 30% sont des professionnels (boss) moyens et 20% sont des professionnels qui ont une certaine maîtrise du métier. Notant que ces gens-là sont à 95% dépourvus de notions théoriques sur les métiers qu’ils exercent.

Chers amis lecteurs, la faiblesse de cette loi est aussi palpable que la réalité elle-même, ce qui nous pousse à soulever des questionner:

Que pensez-vous de la validation des acquis de l’expérience professionnelle (VAEP) au regard de la loi du 21 mai 2018 ?

Pourquoi ne dresse-t-on pas le rapport des dossiers traités à la fin de chaque année académique à la Direction de la certification professionnelle? Contrairement à l’article 16 de la présente loi qui parle de préférence du MENFP.

À quel stade se trouve le processus de lancement de la RVAEP?

Et quelles sont les structures mises en place pour implémenter cette loi?

Dans l’objectif de favoriser tout un chacun, ne serait-il pas important d’avoir une version validée en créole de ladite loi ?

Quelle est le rôle ultime de la Direction de la certification professionnelle par rapport à la commission nationale de développement de la VAEP ?

La Direction de la certification professionnelle ne devrait pas être une direction technique au sein de l’INFP ?

Pour quelles raisons ne fait-on pas mention de l’Institut national de formation professionnelle (INFP) dans cette loi ? Tandis qu’en réalité, c’est cet institut-là qui est le bras opérationnel du ministère de l’Éducation nationale en matière de formation professionnelle.

Pourrait-on implémenter de manière effective cette loi sans l’aval ou la bénédiction de l’INFP ?

En guise de conclusion, ce serait justice si, toutefois, l’État mettait une structure adéquate dans le but d’implémenter efficacement la loi du 25 février 2019, tout en certifiant les professionnels des rues ayant répondu aux critères prédéfinis. En dépit de tout, l’État se trouve dans l’obligation d’amender certains articles, faisant mention de l’INFP en tant qu’organe régulateur dudit secteur !

Vu ma compréhension du milieu professionnel haïtien, il n’est que d’attendre !

Ruben Sanon, Ing.

sanonruben@yahoo.com

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