S’agissant des mesures prises par le gouvernement pour gérer la situation, James Boyard estime qu’elles ne sont pas suffisantes, car, insiste-t-il, on fait face à un type de kidnapping qui a une finalité politique. Selon M. Boyard, il faut utiliser des outils politiques pour résoudre le problème de manière durable. « Les mesures actuelles vont peut-être limiter l’ampleur du problème, mais pour trouver une solution durable, il faut des outils politiques », ajoute-t-il persuadé.
Eu égard aux faibles rendements des forces de l’ordre face à l’insécurité qui prévaut dans le pays, d’aucuns se demandent s’il y a vraiment une stratégie élaborée pour mettre un frein au phénomène. Pour sa part, le professeur James Boyard, en bon observateur, se veut plutôt réaliste. « Il y a une stratégie, peut-être, articulée surtout autour du renforcement de la mobilité, de la visibilité de la police dans les rues, des actions de renseignement de type opérationnel (tactique), de la nécessité de renforcer les moyens (capacités) de la PNH pour mener des opérations ciblées (opérations coup de poing). Oui, il y a une stratégie. Mais le problème ne réside pas dans la stratégie, c’est la détermination des facteurs en cause du phénomène. C’est ce qui, le plus souvent, fait défaut dans toutes les stratégies adoptées par les autorités pour lutter contre le phénomène », analyse le spécialiste, évoquant une insécurité multifactorielle et multidimensionnelle. Pour le professeur, la stratégie doit tenir compte de cette complexité.
Pour le professeur Boyard, la police nationale, d’un point de vue général, ne doit pas être le seul, ni le premier acteur à faire face au phénomène de l’insécurité, ou de la criminalité. Différents ministères doivent s’impliquer, si l’on veut tenir compte des autres problèmes liés à la pauvreté, la démographie, le manque d’éducation, l’économie, la politique…
De l’avis de l’analyste, il y a des failles au sein des institutions, dont la police et la justice, soit par manque de stratégie ou par manque de moyens. Le niveau d’insécurité auquel le pays est confronté n’est pas de « type judiciaire » ; les institutions ordinaires, dont la police et les tribunaux, peuvent gérer ce genre de situation. Il est de « type défense », tenant compte de l’ampleur de la réalité. A ce niveau, il faut l’implication directe des autres forces, estime James Boyard.
Pour le professeur Boyard, la lutte contre les gangs armés doit s’articuler autour de la méthode des trois C : a) le confinement, où l’on déploie de grandes forces capables d’empêcher le débordement des gangs sur les grands axes ; b) la confrontation, où sont engagées des actions pour détruire les infrastructures de ces gangs armés ; c) la consolidation, où les différents ministères s’impliquent et jouent leur partition.
Par ailleurs, M. Boyard pense qu’il faut aussi tenir compte des rapports des gangs avec la politique et des membres du secteur privé des affaires. Les acteurs politiques développent des rapports à la fois passif ( où ils sont victimes de ces derniers en répondant à leurs désidératas dans des moments particuliers) et actifs (en décidant de les instrumentaliser à leurs fins). A côté d’eux, il y a des des membres du secteur privé qui utilisent les bandits pour préserver leurs intérêts commerciaux, souligne James Boyard, qui en appelle à des mesures politiques pour résoudre le problème, lequel est politique.