La crise est devenue une référence dans la politique haïtienne.
Parler de la politique en Haiti c’est évoquer le concept de crise.
Les rivalités entre groupes et clans politiques pour la prise et le maintien du pouvoir plongent toujours cette nation de la caraïbe dans des situations de crise politique aigüe.
Cependant à partir de la fin du 20e siècle où la communauté internationale a fait des droits de l’homme ,de la démocratie un idéal à atteindre par toutes les nations du globe ,
L’espoir de voir la crise haïtienne prendre fin allait surgir .
Toutefois, cette communauté internationale,représentée par la plus grande des Organisations Internationales à travers le monde , l’ONU, ne parvient jamais à établir la démocratie en Haiti et à faire respecter les droits de l’homme.
Je me rappelle de mon dernier exposé à la Universidad Rey Juan Carlos de Madrid , dans le cadre du séminaire sur le Droit International des Droits de l’homme,
J’ai présenté le bilan mitigé des opérations de l’ONU en Haiti en matière de promotion et protection des Droits de l’homme .
Apres ma présentation,le professeur Rogelio m’a demandé , avec pitié: comment Haiti, une nation située tout près des USA ,est elle devenue si pauvre ?
Quelle est l’implication des acteurs internationaux dans la crise haïtienne (traduction française)?
Ces différentes questions m’ont permis d’approfondir mes réflexions sur la politique internationale et les rapports d’Haïti avec différents Etats appelés souvent amis d’Haiti .
Cette communauté internationale qui est à la base des Pactes internationaux relatifs aux droits civils politiques économiques culturels…se trouve dans l’incapacité de faire de ces droits une réalité dans le cas d’Haiti.
De 1990 à nos jours les Nations unies interviennent en Haiti de manière régulière avec un bilan négatif et des résultats en dessous des attentes .
Dans le cas d’Haïti la crise se maintient tout comme les missions Onusiennes se maintiennent .
Après plusieurs décennies de présence accrue en Haiti n’ayant abouti à aucun résultat concret,
La stratégie de la crise ne serait elle pas une formule utilisée par les décideurs internationaux pour légitimer leur présence en Haiti ?
En intervenant en Haiti de manière continue ,toujours pour les mêmes raisons ,l’hypocrisie des acteurs internationaux ne serait -elle pas flagrante ?
En matière de démocratie,le conseil des droits de l’homme de l’ONU a énuméré un ensemble d’éléments indispensables à sa survie dont le plus important est le strict respect des Droits de l’homme .
Alors que dans le cas d’Haiti le respect des de Droits de l’homme n’a jamais été une réalité sinon que fiction .
Mais le plus inquiétant en tout cela ,
Les acteurs internationaux ne sont pas prêts à mettre en œuvre des politiques pouvant permettre à Haiti de s’autodéterminer afin de pouvoir répondre à ses besoins que par elle même.
Malgré leur bilan mitigé ,ils encouragent toujours des programmes bidons téléguidés par l’USAID,UNICEF, PNUD , PAM …qui aident uniquement à masquer leur politique humanitaire mais ne pouvant servir à éradiquer la pauvreté en Haiti.
En outre , le Pacte International Relatif aux droits civils et politiques a fait de l’alternance politique par les urnes :l’autre volet le plus important dans une démocratie.
A travers cela ,les elections représentent l’expression de la volonté populaire.
Dans le cas d’Haiti, cette même communauté internationale exige d’organiser des élections régulièrement.
Mais comment Haiti va pouvoir organiser des élections régulièrement si elle n’a pas les moyens de sa politique ?
Comment demander à un petit Etat comme Haiti, dépendant de la communauté internationale, d’entrer dans une telle dynamique sans tenir compte des prérequis ?
Imposer la démocratie à Haiti sans l’aider à poser les bases ,
n’est elle pas une stratégie d’alimentation de la crise ?
Je crois qu’en ce moment de crise aigüe, les réflexions politiques pour la prise du pouvoir doivent cesser et faire places aux réflexions politologiques qui peuvent aider à cerner la crise et à proposer des pistes de solutions.
Le problème n’a jamais été les dirigeants haïtiens y compris Jovenel Moise .
C’est un problème de symbiose comme le stipule le Professeur Josué Louis .
N’importe quel politique haitien devenu président aura à faire face à cette situation de crise si en cette période difficile nous ne posons pas les bases de la reconstruction de la nation haïtienne.
Certains disent qu’il faut revenir à l’ordre démocratique ;
Ce n’est que de l’ignorance .
Nous n’avons jamais connu de démocratie en Haiti .
Dailleurs nous sommes dans une crise de transition démocratique en Haiti de 1986 à nos jours .
De plus, les acteurs internationaux ne mettent emphase que sur les élections pour parler de démocratie en Haiti alorsqu’ils savent que les élections ne valent rien si les bases de la démocratie ne sont pas posées.
Seymour Lipset, grand intellectuel américain, a présenté certains éléments indispensables à la démocratie tels que : 1)mobilité sociale,
C’est à dire il faut permettre aux jeunes des quartiers populaires de grandir dans la société
de passer d’une étape à une autre
2)la circulation des capitaux
C’est à dire permettre aux gens d’avoir accès au crédit
Faciliter la création de richesse
3) l’Éducation qui constitue l’élément le plus important car, un peuple qui n’est pas éduqué est facile à manipuler et sera responsable de son malheur.
Toutes les Nations dites avancées ont en quelque sorte appliqué les principes de Lipset .
Car,la démocratie ne se réduit pas à une simple question de respect de la constitution, d’État de droit et d’alternance politique mais avant tout il faut mettre emphase sur le volet socio-économique qui échappe à Haiti.
Aujourd’hui plus que jamais les Haïtiens doivent s’unir
Ils doivent dialoguer afin de trouver une issue à la crise .
La théorie du complot a toujours fonctionné dans le cas d’Haiti
La seule façon de s’en sortir c’est en mettant fin aux rivalités pour la prise du pouvoir.
Jovenel Moise doit convoquer les acteurs politiques de l’opposition et de la société civile pour une entente nationale.
Car ,le Droit ne peut plus cerner la situation d’Haiti,la constitution ne peut plus donner de réponse à la crise.
À présent c’est à la politique de placer le dernier mot .
Nous avons une nation à sauver
Nous devons tous faire d’Haiti notre priorité.
NB: L’Uruguay et le Chili constituent de très bons modèles de transition démocratique .
Si l’on tient compte de leurs procédés
On pourra y arriver.
Comme le dit souvent le Professeur Sterlin:
“Les crises appauvrissent davantage les pauvres
et enrichissent davantage les riches”.
La stratégie de la crise ne peut-être fatale pour les filles et fils d’Haiti .
Seule une entente nationale pourra sauver Haiti .
Mathias L. Dévert